Pour ce premier review de 2020, je vous propose de revenir sur l’un des films marquants de ces dernières années. Adulé par la critique, lauréat de nombreuses récompenses prestigieuses aux Etats-Unis, La La Land semble être l’un des phénomènes du cinéma populaire. Damien Chazelle, son réalisateur, s’est ouvertement inspiré de plusieurs grands films français (les Parapluies de Cherbourg, les Demoiselles de Rochefort) pour construire une œuvre colorée et à la partition musicale innovante. Mais La La Land mérite t-il toutes les louanges qui lui ont été attribuées ? Décryptage...
Le résumé
Dans un Hollywood où chaque étoile brille de mille feux, Mia et Sebastian, deux individus aux destins croisés, se rencontrent et s’éprennent d’un amour certain. Au fil des saisons, les sentiments prennent de la vigueur, évoluent tout comme leurs vies, leurs carrières respectives : lui est jazzman, elle cherche le rôle idéal pour devenir une grande actrice. Mais tous deux vivent du peu pour s’en sortir là où tout semble pourtant parfait et idéal. Qu’adviendra t’il de leurs premiers émois ?
L’analyse
Damien Chazelle, réalisateur de talent reconnu pour plusieurs de ses oeuvres dont le brillant Whiplash, film puissant au rythme exceptionnel porté notamment par le charismatique J.K Simmons en version contemporaine du Gunnery Sergeant Hartman (Full Metal Jacket) s’attaquait avec La La Land à un défi considérable : celui de proposer aux spectateurs désormais avides de sensations une comédie musicale proche des racines de ce genre porté par plusieurs grandes réussites : Le magicien d’Oz (1946), Chantons sous la pluie (1952), West Side Story (1960), La mélodie du bonheur (1965), pour ne citer que ceux-ci parmi un panthéon fleuri.
Particulièrement en vogue ces dernières années mais souvent malhabile voir complètement raté (à en croire le récent bide de Cats, qui coûtera plus de 70 millions de dollars à ses studios en décembre 2019, soit une des plus grandes catastrophes de l’histoire du cinéma), le genre du film musical reste assez timide. Pourtant, Damien Chazelle choisit, de par ses racines françaises et américaines, de s’inspirer des comédies musicales de Jacques Demy (mari d’Agnès Varda) pour faire un film hors normes, spectaculaire.
La La Land est fier d’une scène d’ouverture tout à fait surprenante et convaincante. Celle-ci donne le ton d’un film à la hauteur des objectifs voulus par son réalisateur. Dans ce registre cinématographique, le travail de la caméra est aussi important que les chorégraphies qui doivent être parfaitement suivies. L’alliance de techniques contemporaines, d’un format en CinemaScope (qui fait penser aux plus belles réussites du cinéma américain), un soin tout particulier apporté aux décors le plus souvent naturels et non faits d’écrans vert se ressent et se voit.
Au delà d’une scène d’ouverture colorée et finalement très actuelle, ce qui se déroule est particulièrement maîtrisé tant par le réalisateur et les acteurs qui y mettent tout leur talent pour faire de ce film un brillant hommage au glorieux cinéma musical des années 1950-1960. C’est en conséquence particulièrement réussi et prenant : les longues minutes de chorégraphies sont agréables à l’oeil et à l’oreille parce que bien travaillées.
La trame narrative, découpée en saisons dotées d’émotions propres et de couleurs adéquates, est globalement judicieuse, et permet d’éviter un essoufflement au bout de quelques minutes et une redondance souvent observable dans les films musicaux de seconde zone.
Des acteurs particulièrement impliqués
Le choix des acteurs aurait pu être
particulièrement fatidique et responsable de l’échec de tout l’art déployé dans le film. Au contraire : le duo incandescent de Ryan Gosling et Emma Stone, loin bien sûr de faire penser aux plus beaux couples hollywoodiens, est toutefois l’un des plus agréables à l’écran. Une véritable alchimie, une complicité sont largement observables dans les scènes émotionnelles, et leur travail respire l’osmose et la bonne entente.
Leur investissement tout au long du film est bien réel : absence de doublures, préparation physique et artistique considérable. Les scènes de pianos sont toutes bien réelles. Ryan Gosling s’étant improvisé pianiste pour pouvoir donner d’avantage de réalisme à son personnage de Jazzman passionné mais en cruel manque de réussite.
Une trame musicale jazzy et pop
Bien évidemment, les films musicaux reposent en majeure partie sur leur partition musicale faite de moments plus sobres et de passages vigoureux et riches en notes plus hautes les unes que les autres. Dans La La Land, la musique est signée de John Legend et Justin Hurwitz : qu’elle splendide réussite ! Les passages chantés (par les acteurs eux-mêmes) sont constamment accompagnés d’une musique. Les chansons sont complexes (« Someone in the crowd ») et particulièrement nécessaires à la transmission d’émotions dans l’évolution de la relation entre Mia et Sebastian. On pensera par exemple à « Lovely Night », dont la scène tournée dans les hauteurs de Los Angeles est particulièrement réussie dans la chorégraphie, la bande-son, la photographie et la mise en scène globale.
En conclusion...
En résumé, La La Land est pour moi une réussite intégrale. Concernant sa mise en scène, le travail de Damien Chazelle, à qui ce film tenait particulièrement à coeur car permettant de renouer avec ses souvenirs cinéphiles est remarquable. Les spectateurs les plus avertis seront trouver en La La Land un vrai hommage sincère au glorieux cinéma américain qui fit de Los Angeles « City of Lights » le haut-lieu de la production cinématographique américaine et mondiale, et surtout la ville où tous les rêves se réalisent. Dans La La Land, les émotions sont là, virevoltent et nous entraînent.
Comments