L’exploration du travail du cinéaste se poursuit à travers son coup d’essai, film historique de qualité. Premier film d’un réalisateur en devenir, Les duellistes frappe d’abord par le soin apporté à la narration et à la mise en scène.
2 ans avant Alien, Ridley Scott entamait, à travers un drame historique, son exploration de l’affrontement entre le bien et le mal, entre la violence et le pacifisme, des valeurs propres et chères à l’homme. Keith Carradine et Harvey Keitel incarnent à merveille ces deux valeurs exploitées dans cette adaptation d’une histoire vraie qui se déroule dans la France et l’Europe du tout début du XIXe siècle. Les duellistes, deux hommes aux valeurs similaires mais à la morale opposée, s’écharpent puis s’affrontent dans de violents et sanglants duels, pendant une quinzaine d’années. L’un est solitaire, l’autre cherche à se construire une vie de famille. L’un est volage, l’autre est attaché aux valeurs de la fidélité et de la sincérité.
Avec Les duellistes, Ridley Scott s’atèle à son projet de vie en tant que réalisateur. L’exploration des vices et vertus de l’homme, à travers le temps passé (l’histoire) et le temps imaginé (le futur, incertain) en proposant une relecture sensible et adaptée, pour produire un cinéma historicisé à de nombreuses reprises, mais suffisamment retravaillé pour ne pas tomber dans le gouffre du film historique et proposer (parfois trop), du cinéma-divertissement. Souvent pessimiste, le cinéma de Scott s’incarne déjà dans ce premier film où cette obsession du duel dans un laps de temps réduit (plus d’une décennie), ponctué par la présence de sentiments et éléments purement humains (l’amour, la haine, l’honneur, la guerre...) semble symboliser l’histoire de l’humanité rongée par une violence excessive et maladive et dont l’utopie rêvée de la paix et de l’épanouissement se retrouve toujours ébranlée - parfois après de longues années de calme - par une phase guerrière, une pulsion dévastatrice dont l’objectif est parfois flou.
C’est en cela que Les duellistes fait doublement réfléchir sur le sort d’une humanité condamnée à la violence et dont l’émancipation paraît délicate mais aussi sur cette pratique purement française qu’étaient les duels de leurs origines dans la France d’Ancien Régime jusqu’au dernier perdu par René Ribière en 1967.
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