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La grande illusion, Jean Renoir (1937)

Photo du rédacteur: ValentinValentin

Dernière mise à jour : 21 sept. 2019




Il paraît difficile, en 2019, de commenter un tel film tant il paraît complètement désuet, éloigné. Mais, incontestablement, La grande illusion fait partie des œuvres importantes du cinéma qu'il faut avoir vu une fois dans sa vie. Alors il ne s'agira pas ici d'en faire une "critique", mais plutôt d'en entrevoir les qualités majeures afin d'inaugurer cette catégorie "Instant classiques" : les intemporels du cinéma.

Fils du peintre français impressionniste Auguste Renoir, Jean Renoir est depuis bien longtemps reconnu comme l'un des cinéastes les plus importants du cinéma français, grâce à une oeuvre particulièrement engagée sur le plan politique au cours des années 1930, et particulièrement en faveur du communisme, du Front Populaire. Ainsi, La règle du jeu, Le crime de Monsieur Lange ou La bête humaine font partie du cercle restreint des classiques intemporels dont la renommée s'est considérablement accentuée grâce à la Nouvelle Vague et certains cinéastes comme François Truffaut.

La Grande illusion fait partie du cycle des réalisations de Renoir qui sont particulièrement imprégnées de thématiques humanistes et pacifiques. Il s'agit pour son auteur d'y dénoncer l'absurdité de la guerre, dans ses causes et ses effets. Réalisé en 1937, le film se situe donc dans un contexte délicat, à l'orée de la Seconde Guerre mondiale dans une Europe déchirée par le fascisme et le nazisme, en évoquant la Première Guerre mondiale et ses conséquences sur la civilisation.

Portée par plusieurs acteurs de grand talent, dont l'immense Jean Gabin et l'autrichien Erich Von Stroheim, La Grande illusion est un film attachant, rempli d'émotions et particulièrement touchant de sincérité. Profondément pacifique, humaniste mais loin d'être épris de naïveté, son message est très positif et vise à démontrer la vanité des conflits :

  1. D'abord, le conflit entre classes. Le film permet une mise en scène des relations entre classes sociales : aristocrates, enfant de Paris, acteurs, illustrateurs et ingénieurs tous réunis au sein de l'armée. Jean Renoir montre néanmoins l'abolition de ces strates sociales dans un contexte de déclin de l'aristocratie militaire : Capitaine et Commandant, français et allemand, conviennent que peu importe quand viendra la fin de la guerre, celle-ci sonnera la fin de leur supériorité militaire. La guerre provoque l'abolition des frontières sociales visible dès le tout début du film où le Capitaine allemand invite ses prisonniers à s'attabler à ses côtés. Peut-être qu'il s'agit avant tout de montrer l'illusion des classes et de leurs affrontements vains.

  2. Puis, le conflit entre nations. La Grande illusion montre que la guerre génère des situations absurdes et que, malgré les atrocités commises, celle-ci n'altérerait pas l'essence-même de l'homme. Plusieurs éléments le prouvent. La relation entre le Capitaine de Boëldieu et le Commandant von Rauffenstein, qui sont censés être ennemis (double relation de dominant-dominé : français contre allemand, captif contre geôlier) permet la mise en oeuvre d'une pensée contre les nationalismes, contre l'antisémitisme. Le dernier tiers du film, en pleine campagne allemande, ne renforce que l'aspect humaniste de l'oeuvre, s'affranchissant tant des barrières de la langue que des frontières : " Ah ! qu'est-ce que tu veux, la nature s'en fout ! Une frontière, ça se voit pas, c'est une invention des hommes " (Rosenthal). Voici là aussi une autre illusion démontée : la guerre ne fait qu'alimenter l'idée de l'existence de conflits entre nations comme moyens d'expression de l'évolution des sociétés : bien au contraire.

L'aristocrate à l'accent British Boëldieu et le Commandant von Rauffenstein.

Film nécessaire et essentiel, La Grande illusion se distingue aussi par une histoire mouvementée. Son pacifisme lui nuira dès 1939, en raison de la Censure opérée en Italie comme dans le Reich. Mais, malgré cette sombre coupe, il demeure possible d'en admirer les qualités grâce à sa restauration complète opérée en 2012.

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